Rubrique sous la responsabilité du Dr Manon Gantenbein, PhD, Responsable du Clinical and Epidemiological Investigation Center du LIH Magasine SEMPER, édition janvier 2021 – www.dsb.lu
Lancée sous l’égide de la «Task Force COVID-19» de Research Luxembourg le 24 avril dernier, «Predi-COVID» est une étude de cohorte coordonnée par le Luxembourg Institute of Health qui vise à identifier les principaux facteurs de risque et les biomarqueurs associés à la sévérité de la COVID-19 et à comprendre les conséquences à long terme de la maladie sur la santé de la population. Predi-COVID contribuera à une meilleure compréhension de l’hétérogénéité observée dans la gravité et dans le pronostic de la maladie, permettant à terme une évaluation précise des patients infectés par le SARS-CoV-2 et des prises en charge plus personnalisées.
Le protocole de l’étude a été publié le 24 novembre dans le «British Medical Journal Open», renforçant la visibilité internationale et le succès de ce projet «Made in Luxembourg» hautement collaboratif.
L’étude de cohorte Predi-COVID a été lancée dans le but de définir quels profils de patients peuvent être associés à une forme plus sévère de la maladie.
Ses objectifs principaux sont d’identifier les caractéristiques cliniques, épidémiologiques et sociodémographiques, ainsi que des biomarqueurs spécifiques du virus SARS-CoV-2 et du patient, qui peuvent aider à prédire l’évolution de la maladie chez un individu donné, en fonction de son profil immunitaire, entre autres.
En effet, une des particularités de l’étude est de viser à effectuer un phénotypage numérique profond des participants (voir encadré ci-contre).
Predi-COVID est une cohorte constituée de personnes nouvellement diagnostiquées au Luxembourg comme positives au virus SARS-CoV-2. Parallèlement à Predi-COVID, l’étude ancillaire «Predi-COVID-H» a été lancée pour inclure des membres du foyer de participants positifs à la COVID-19 afin d’étudier la transmission du virus dans cette population à haut risque.
La phase de recrutement et de collecte des données et échantillons a commencé le 5 mai dernier et se poursuivra jusqu’à mi-2021. Toute personne de plus de 18 ans peut participer à l’étude dès lors qu’un test de diagnostic réalisé au Luxembourg se révèle positif au SARS-CoV-2. Afin de pouvoir caractériser l’infection à la Covid-19 dans la population pédiatrique, pour laquelle très peu de données sont disponibles à ce jour, l’inclusion de jusqu’à 100 enfants positifs à la Covid-19 dans Predi-COVID et de jusqu’à 30 enfants de foyers affectés dans Predi-COVID-H est actuellement en préparation en collaboration avec le Centre Hospitalier de Luxembourg (CHL) et devrait débuter début 2021. En pratique, la participation à l’étude consiste en une collecte de données pour tous les participants, associée à une collecte d’échantillons biologiques pour un sous-ensemble d’au moins 200 volontaires adultes de la cohorte Predi-COVID et de 100 participants Predi-COVID-H, afin de mieux caractériser les symptômes et de définir clairement les différents profils. Les données cliniques et démographiques des participants (traitements en cours, symptômes liés à la Covid-19, comorbidités, caractéristiques sociodémographiques etc.) sont collectées au moment de leur inclusion dans l’étude.
Puis l’évolution de la santé et les symptômes des patients recrutés sont suivis quotidiennement grâce à différents outils numériques à distance, selon que les patients sont à domicile ou à l’hôpital, pendant 14 jours à compter de la confirmation du diagnostic. De courtes évaluations supplémentaires sont également effectuées tous les mois pendant un an, afin d’évaluer les conséquences potentielles à long terme de la Covid-19.
«Predi-COVID est une cohorte constituée de personnes nouvellement diagnostiquées au Luxembourg comme positives au virus SARS-CoV-2.» |
Des données numériques innovantes, en particulier des enregistrements vocaux, sont également collectées via une application pour smartphone développée par le LIH: CoLive LIH. Les participants sont invités à effectuer 2 types d’enregistrements vocaux: le premier consiste à lire un texte affiché sur l’écran et le second à prononcer le son «Aaaah» le plus longtemps possible (cf Figure 1).
La collecte d’échantillons biologiques est réalisée soit à domicile par des infirmiers spécialisés du Centre d’Investigation et d’Epidémiologie Clinique (CIEC) du LIH soit par le personnel hospitalier lorsque le participant est hospitalisé.
Les prélèvements sont effectués à l’inclusion dans l’étude et lors d’une visite de suivi et plusieurs échantillons biologiques - des prélèvements sanguins, de salive, des selles et des écouvillons nasopharyngés - sont prélevés afin d’identifier des marqueurs prédictifs humains et viraux.
Depuis le 5 mai - date de recrutement du premier participant - 1686 et 71 sujets éligibles ont été contactés par téléphone pour être invités à participer respectivement dans Predi-COVID et Predi-COVID-H. Parmi eux, 642 et 50 ont respectivement accepté d’être inclus. L’âge moyen des participants est de 39 ans.
En termes d’échantillons biologiques, une biobanque unique a été mise en place pour étudier la Covid-19, avec plus de 660 spécimens collectés chez 180 participants Predi-COVID et 47 participants Predi-COVID-H lors des visites d’inclusion et de suivi.
Cette collection comprend des échantillons de sang, d’expectorations, de selles, de cheveux et des écouvillons naso-pharyngés. Ces échantillons sont actuellement en cours d’analyse dans le cadre de l’étude Predi-COVID et de 9 études auxiliaires financés par le Fonds National de la Recherche ou par le programme «Horizon 2020» de la Commission européenne, toutes portantes sur l’étude de la Covid-19.
Les résultats préliminaires indiquent également que la majorité de la population participant à l’étude a présenté peu de symptômes ou des symptômes légers. Les symptômes les plus courants à l’admission étaient la fièvre (26,2% des participants), la toux (23,3%), l’écoulement nasal (12,2%) et les maux de gorge (10,8%), tandis que les comorbidités et les facteurs de risque les plus courants sont le tabagisme (18,1% des participants), l’asthme (5,4%), le diabète (4,7%), les cardiopathies chroniques (3,6%) et l’obésité (3,3%). De plus, plus de 4.000 enregistrements vocaux ont été mis à disposition par 291 participants par le biais de l’application smartphone «CoLive LIH», chaque personne ayant effectué les deux types d’enregistrements différents plusieurs fois au cours du temps pour permettre d’étudier l’évolution des caractéristiques vocales.
Celles-ci permettront l’identification de «biomarqueurs vocaux» de symptômes fréquemment observés chez les patients atteints de la Covid-19, comme les syndromes respiratoires, la fatigue, l’anxiété ou les émotions négatives liées à la Covid-19, qui pourraient ensuite être utilisés pour la surveillance à distance des patients à domicile (cf encadré ci-contre). Les analyses de ces enregistrements vocaux ainsi que des données cliniques associées sont actuellement en cours, suivant une méthodologie «in-house». Predi-COVID est coordonné par le Department of Population Health (DoPH) du Luxembourg Institute of Health (LIH) et dispose d’un consortium hautement interdisciplinaire d’instituts de recherche luxembourgeois, dont le Department of Infection and Immunity (DII) du LIH, l’Integrated Biobank of Luxembourg (IBBL), le Laboratoire National de Santé (LNS), l’Université du Luxembourg, le Luxembourg Center for Systems Biomedicine (LCSB), le Centre Hospitalier de Luxembourg (CHL) et les Hôpitaux Robert Schuman (HRS). L’étude est cofinancée par le Fonds National de la Recherche du Luxembourg (FNR) et par la Fondation André Losch.
«Les résultats préliminaires indiquent également que la majorité de la population participant à l’étude a présenté peu de symptômes ou des symptômes légers.» |
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