English (United States)
 

Limiter les métastases en ciblant le métabolisme des cellules tumorales

20/01/20
reduce font Size enlarge font Size print content
Category: Oncology / Cancer
ART8073FL13OE686.jpg

Cet article est paru dans le magasine Semper www.dsb.lu - Edition Décembre 2019
Rubrique « Recherche » sous la responsabilité du Dr Manon Gantenbein, PhD, Responsable du Clinical and Epidemiological Investigation Center du LIH

Limiter les métastases en ciblant le métabolisme des cellules tumorales

L’Université du Luxembourg lance un nouveau projet de recherche en oncologie, qui en analysant le métabolisme cellulaire dans le cancer colorectal, vise à identifier de nouvelles stratégies thérapeutiques pour la prévention de métastases.
 

Dr Elisabeth Letellier, Life Sciences Research Unit, Molecular Disease Mechanisms Group, Université du Luxembourg
 

Malgré les progrès réalisés au cours des dernières décennies, le cancer colorectal (CRC) demeure l’un des cancers les plus fréquents et les plus mortels des pays occidentaux. L’incidence mondiale devrait augmenter de 60% à plus de 2, 2 millions de nouveaux cas et 1,1 million de décès d’ici à 2030. Au Luxembourg, le CRC est le deuxième cancer le plus fréquent et le plus mortel chez les femmes et les hommes. Chaque année, 284 patients reçoivent un nouveau diagnostic de CRC et 124 cas de décès sont signalés en moyenne.

En raison de l’absence de symptômes caractéristiques, le CRC est souvent diagnostiqué seulement après que le cancer ait atteint le côlon ou la paroi du rectum (stade II), s’est propagé aux ganglions lymphatiques (stade III) et/ ou aux organes éloignés (stade IV), par exemple le foie ou le poumon. L’intégration de la chimiothérapie à la résection chirurgicale chez les pa¬tients atteints de cancer du côlon avec ganglion lymphatique positif (stade III) a amélioré la survie de 15 à 20% des patients. Cependant, la majorité de ces patients rechuteront ou développeront des métastases, résultant de cellules cancéreuses disséminées qui quittent l’environnement tumoral d’origine et envahissent des organes distants, dans les 5 ans suivant la chirurgie. Plus de 90% des décès liés au cancer peuvent ainsi être attribués à des métastases et non aux tumeurs primaires à partir desquelles ces lésions malignes apparaissent2,3. Il est donc indispensable de mieux comprendre les mécanismes de dissémination des cellules tumorales afin de limiter la formation de métastases et par conséquent de réduire le taux de mortalité dans le CRC.

Comme d’autres chercheurs, l’équipe Molecular Disease Mechanisms de la Life Sciences Research Unit à l’Université du Luxembourg a montré que les cellules à l’origine des métastases détournent diverses voies de signalisation afin d’obtenir des avantages malins2,3. Par ailleurs, de récentes données suggèrent que les changements métaboliques sont à l’origine de la dissémination métastatique et plusieurs études ont mis en évidence un profil métabolique différent entre les cellules primaires et métastatiques. La présence de différents nutriments dans la niche tumorale pourrait ainsi imposer des états métaboliques uniques aux cellules métastatiques. Néanmoins, on sait peu de choses sur la manière dont des changements métaboliques spécifiques fournissent de l’énergie aux cellules métastatiques et leur permettent d’acquérir et de conserver les propriétés nécessaires à leur dissémination.

Quel est notre objectif ?

L’objectif de l’étude intitulée MetPM (Intégration de données multi-omiques de tumeurs primaires et métastatiques de patients du cancer colorectal: vers de nouvelles thérapies personnalisées) est d’utiliser les altérations métaboliques des cellules cancéreuses en tant que vulnérabilités sélectives pour des traitements médicamenteux ciblés. Brièvement, les chercheurs vont déterminer les voies métaboliques, qui sont dérégulées dans le cancer colorectal primitif par rapport au cancer colorectal métastatique en utilisant les tissus de patients atteints de CRC. Ils vont ensuite, grâce à l’aide de la bioinformatique, développer un modèle de CRC intégratif pour les CRC primaires et métastatiques. Ceci va conduire à l’identification de nouvelles stratégies thérapeutiques pour la prévention de la dissémination des métastases. A long-terme, ces stratégies devront ensuite être traduites en applications cliniques.

Au Luxembourg, le CRC est le deuxième cancer le plus fréquent et le plus mortel chez les femmes et les hommes.

Quels outils allons-nous utiliser ?

Au cours des dernières années, l’équipe Molecular Disease Mechanisms au sein de l’Université du Luxembourg a mis en place, en collaboration avec différents hôpitaux du pays ainsi qu’avec IBBL – Integrated BioBank of Luxembourg, le Laboratoire national de santé (LNS) et le Clinical and Epidemiological Investigation Centre du Luxembourg Institute of Health (LIH), un prélèvement continu d’échantillons de tissus tumoraux provenant de patients atteints de CRC. Cette collection, qui a débuté en 2010, regroupe à ce jour plus de 150 patients qui sont suivis au cours de leur maladie. Le prélèvement contient du tissu tumoral ainsi que des contreparties normales et différents autres échantillons de prélèvement tels que le sérum, le plasma, les cheveux, la salive et les selles collectés à différents intervalles après le retrait de la tumeur. Pour tous les échantillons de patients, les informations cliniques ainsi que les données moléculaires qui leur appartiennent sont accessibles (âge, sexe, stade de la maladie, etc.), et permet ainsi d’étudier les paramètres cliniques, conduisant finalement à des résultats qui pourront être traduits en clinique.

Comment allons-nous procéder ?

Pour l’étude, de nouveaux patients atteints de CRC seront recrutés et un profilage multi-omique (transcriptome, métabolome et séquençage de gènes liés au cancer) de tissus tumoraux primaires ainsi que de métastases sera réalisé pour analyser tous les composés et les mécanismes. Les modèles métaboliques spécifiques aux patients atteints de CRC seront générés à l’aide d’une approche informatique intégrée. Cette approche permettra d’identifier des traitements médicamenteux adaptés à un patient spécifique. Ces composés seront ensuite validés dans notre laboratoire de cultures cellulaires.
 

 

 

 

 

 

 

 

 

En bref, qu’espérons-nous ?

L’équipe espère que ce projet mènera à la création et à la mise en œuvre d’un outil de dépistage de nouvelles cibles thérapeutiques, susceptible de fournir aux cliniciens de nouvelles informations pour la sélection de thérapies personnalisées.

Le projet MetPM est soutenu par un financement d’amorçage du Personalised Medicine Consortium, qui aide spécifiquement au lancement de nouveaux projets translationnels. Ce projet réunira de nombreux interlocuteurs, à savoir des cliniciens (oncologues du Centre Hospitalier Emile Mayrisch, notamment le Dr Daniel Jodocy et le Dr Gilles Klein), des membres du Clinical and Epidemiological Investigation Centre (Dr Manon Gantenbein, Jérôme Graas, Jessica Calmes Victoria Lorentz et Guilherme Marques), des pathologistes du LNS (Daniel Val, Laurent Antunes, Yervand Karapetyan et Paulo Miranda), et des chercheurs (Dr Carole Linster, Pr. Thomas Sauter, Pr. Serge Haan, Dr Lasse Sinkkonen et Dr Johannes Meiser ainsi que l’investigateur principal de l’étude Dr Elisabeth Letellier). Par conséquent, l’étude réunira les ressources nationales et renforcera la coopération interdisciplinaire dans la recherche sur le cancer au Luxembourg.

Références:

1. J. Douaiher et al., Colorectal cancer-global burden, trends, and geographical variations. J. Surg. Oncol. 115, 619–630 (2017).
2. P. Ullmann et al., The miR-371-373 Cluster Represses Colon Cancer Initiation and Metastatic Colonization by Inhibiting the TGFBR2/ID1 Signa¬ling Axis. Cancer Res. 78, 3793–3808 (2018).
3. T. Celià-Terrassa, Y. Kang, Distinctive properties of metastasis-initiating cells. Genes Dev. 30, 892–908 (2016).
4. G. Pascual, D. Domínguez, S. A. Benitah, The contributions of cancer cell metabolism to metastasis. Dis. Model. Mech. 11, dmm032920 (2018).


 


 

 

 

 

This page shows recent articles about clinical research.

The articles can be sorted by therapeutic area or disease, but may also deal with more general topics not specifically related to a disease. These  articles can be sorted as "other".